De plus en plus de cancers du sein : pourquoi ?
C’est un fait indiscutable : depuis 1920, le nombre de cancers du sein ne cesse d’augmenter. Entre 1990 et 2018, le nombre annuel de nouveaux cas en France a doublé : il est passé de 30 000 à 58 400. Aujourd’hui, c’est le cancer le plus fréquent chez la femme en France, comme dans l’Union européenne et aux États-Unis.
En revanche, les femmes jeunes (moins de 40 ans) ne sont pas « de plus en plus » touchées, comme on peut parfois l’entendre. Le nombre de cancers du sein chez ces femmes jeunes a effectivement augmenté, mais on ne peut pas conclure que le cancer du sein touche deux fois plus de femmes jeunes aujourd’hui qu’il y a trente ans, tout simplement parce que le nombre total de nouveaux cas a lui aussi doublé. Dans 7 % des cas, les cancers du sein sont détectés chez des femmes de moins de 40 ans, et ce pourcentage est stable depuis trente ans.
Pourquoi ce doublement du nombre de cancers du sein ? Une présentation faite par le docteur Florence Molinié, directrice de recherche et épidémiologiste au SIRIC (Site de recherche intégrée sur le cancer) de Nantes-Angers, lors du congrès 2019 de la Société française de sénologie et de pathologie mammaire (SFSPM), éclaire brillamment cette évolution de notre société. Elle montre très clairement que l’augmentation du taux de cancer du sein est liée à un ensemble de modifications du comportement des femmes, qui vont toutes dans le même sens.
Avoir des enfants et cancer du sein
Tout d’abord, les femmes ont aujourd’hui leur premier enfant plus tard : en 1967, seules 12 % des femmes après 30 ans ; en 2015, elles étaient 40 %. Or le fait d’avoir un enfant tôt protège du cancer du sein : c’est formellement démontré à l’échelle des populations. Ensuite, le nombre d’enfants par femme a également diminué au cours des dernières décennies : en France, il était par exemple de 3 enfants par femme en 1950 contre 1,9 aujourd’hui. Or, là encore à l’échelle d’une population, plus les femmes ont d’enfants, moins elles risquent de développer un cancer du sein. Ce qui ne veut pas dire que si vous avez six enfants, vous ne pouvez pas avoir un cancer du sein. Mais si vous prenez 10 000 femmes ayant eu six enfants et que vous les comparez à 10 000 femmes n’ayant eu qu’un enfant, vous observerez un peu moins de cancers du sein dans le groupe des mères de famille nombreuse. Il en est de même pour l’allaitement, qui a un effet protecteur.
Les premières règles et le cancer du sein
Autre facteur clé : l’âge des premières règles. Plus elles sont tardives, moins vous êtes stimulée par vos œstrogènes au cours de votre vie, et plus vous diminuez votre risque de cancer du sein. Si on prend l’exemple de la France, l’âge moyen des premières règles était de 15 ans en 1850, il est de 12,6 ans aujourd’hui.
L’obésité chez la femme et le cancer du sein
Un autre paramètre majeur est le lien obésité-cancer du sein. Le taux d’obésité explose : il a plus que doublé dans une grande partie du monde depuis 1980. Or, l’obésité fait partie des risques majeurs de cancer du sein – on estime que 10 % des cancers du sein survenant après 50 ans sont liés au surpoids.
Le docteur Molinié conclut qu’il est très probable que l’augmentation des taux de cancers du sein que nous observons depuis des décennies est le résultat des modifications des comportements liés à l’évolution du mode de vie des femmes. Ces facteurs peuvent être environnementaux ou reproductifs, mais une chose est sûre : l’augmentation constante du cancer du sein n’est pas liée à un seul paramètre, qu’il s’agisse de l’alimentation, de la pollution ou de toute autre nouvelle divinité du cancer. Elle est multifactorielle.
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