Quel impact du Covid 19 sur le cancer du sein ?
Même si la crise sanitaire liée au Covid 19 n’est pas encore terminée, certains épidémiologistes essayent d’en tirer un premier bilan en termes de santé publique. Si les conséquences directes sont faciles à analyser, l’impact indirect est en revanche plus complexe à appréhender, même si les chiffres sont parlants : des tests de diagnostic HIV aux examens cardiologiques, tous les indicateurs de dépistage semblent en forte baisse. Quel impact a donc eu le Covid-19 sur le dépistage et le traitement du cancer du sein ?
Petit tour d’horizon avec le Dr Anne Sabaila Ollier, chirurgienne sénologue spécialiste en reconstruction mammaire à l’Institut du Sein.
Les conséquences indirectes du Covid-19
Quelques chiffres suffisent à montrer combien la crise du Covid a impacté en effet tout le système de santé : d’un côté, les services d’infectiologie et de soins intensifs ont été débordés, de l’autre les Français ont ralenti leur demande de soins et certaines interventions ont été déprogrammées.
C’est ainsi que sur 2020, la consommation d’actes médicaux a chuté de manière conséquente en médecine de ville, notamment chez les chirurgiens-dentistes (-8,9%), les médecins (-5%), les transports sanitaires (-9,4%) ou encore les kinés (-11,9%). Il en est de même en milieu hospitalier, puisque par exemple les hospitalisations pour AVC ont carrément baissé de 40 % sur le 1er confinement, un phénomène qu’on observe partout à l’échelle mondiale.
Une pathologie comme le cancer du sein a bien évidemment été elle aussi impactée dans sa prise en charge, à la fois en prévention et en traitement.
Les conséquences du Covid 19 sur le dépistage du cancer du sein
On ne cesse, à juste titre, d’insister sur l’importance du diagnostic précoce en matière de cancer du sein, notamment par mammographie ou par échographie.
Confinements, restrictions sanitaires, peur de sortir ont évidemment cassé cette dynamique.
Dans un podcast complet, le Dr Anne Sabaila évoque des études internationales estimant que sur 10 000 femmes opérées, un retard de 3 mois dans la prise en charge induirait environ 30 morts de plus.
Une étude publiée le 14 juillet 2021 dans le Journal of the National Cancer Institute estimait l’augmentation du nombre de décès à 0,52 % minimum entre 2020 et 2030, avec selon la modélisation 950 décès supplémentaires liés à un dépistage réduit, et 151 de plus liés à une chimiothérapie réduite en stade précoce.
Mais comme le signale le Dr Sabaila Ollier, il est impossible de généraliser à des cas individuels, car la perte de chance intervient surtout sur des tumeurs du sein agressives et vite évolutives, alors que l’impact est quasi-nul sur des lésions peu invasives.
Les conséquences sur le traitement du cancer du sein
On estime aussi qu’il existe potentiellement une perte de chance liée au retard de traitement, notamment avec une chimiothérapie retardée ou réduite. En revanche, on peut considérer qu’il n’y a aucune conséquence sur les soins de radiothérapie.
Concernant la chirurgie, il faut être conscient qu’au total, seulement 20% des chirurgies ont été déprogrammées.
Pour le cancer du sein, ces déprogrammations ont porté quasi-exclusivement sur les chirurgies de reconstitution du sein, pour lesquelles il n’y avait pas de caractère d’urgence. En revanche, toute chirurgie dont le retard pouvait altérer le pronostic a été maintenue : pour cela, les chirurgiens de l’Institut du Sein ont repris les critères établis par des sociétés savantes et des conférences de consensus, conformément aux données médicales et épidémiologiques dont elles disposaient.
Le vrai problème s’est parfois posé avec quelques patientes qui ont préféré renoncer à une chirurgie, dans un climat anxiogène qui venait se rajouter probablement à leur inquiétude face à la maladie.
Une prise en charge du cancer du sein adaptée au Covid19
Heureusement, comme l’explique avec beaucoup de positivité le Dr Anne Sabaila Ollier dans son podcast « Cancer du sein et Covid 19 », les praticiens ont su s’adapter rapidement, pour garantir la continuité des soins sur des patientes dont on devait considérer, a priori, qu’elles souffraient d’une co-morbidité pouvant les rendre plus à risques. Même si c’est en réalité moins tranché sur un cancer du sein, fort heureusement.
Un hôpital et des cliniques plus sûrs
Dans les établissements de soins médico-chirurgicaux, un gros effort a été fait pour renforcer les règles d’hygiène et les protocoles sanitaires : aération des salles d’attente, désinfection accrue des surfaces, respect des gestes barrières…
Des circuits ont été établis par secteurs, afin de séparer les malades du covid des autres patients. Leur température est contrôlée et il est parfois demandé, sur des interventions programmées, un dépistage pré-opératoire par test PCR.
Évidemment, comme chirurgien spécialiste en cancer du sein, le Dr Sabaila Ollier explique qu’il faut savoir s’adapter aussi au malade et à sa pathologie.
Si la règle est de venir non accompagné, on y déroge évidemment dans certaines situations, où l’accompagnement psychologique d’un proche s’avère indispensable.
L’objectif est toujours de soigner le patient dans son intégralité, et cela inclut aussi son mieux-être psychique.
Quelles sont les patientes prioritaires ?
C’est assez simple : toute patiente atteinte d’un cancer du sein ou devant faire un dépistage doit se considérer comme prioritaire, et poursuivre sans crainte son parcours de soin. C’est ensuite le chirurgien ou le cancérologue qui peuvent, si les conditions sanitaires l’exigent, interrompre ou retarder un acte.
Avec une règle simple : il ne faut jamais altérer le pronostic.
Prévention et traitement permettent aujourd’hui de soigner de mieux en mieux les cancers du sein, Covid ou pas Covid !
Pour en savoir plus : le podcast sur le profil Instagram de l’Institut du Sein ici.
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